Comment s’incarne aujourd’hui le sacré dans le Grand Paris ? L’observation du rapport entre l’agglomération parisienne et le sacré permet de croiser les regards de l’historien, du géographe, du sociologue, de l’architecte et de l’urbaniste. Tous constatent les mêmes tensions contradictoires.
Alors que, dans les années 1980 et au début des années 1990, les géographes et les sociologues cherchaient à voir comment la ville sortirait du religieux et comment les sacralités civiques seraient balayées par l’individualisme post-moderne, on constate aujourd’hui que non seulement le sacré continue à faire de la ville sa demeure mais que celui-ci y résiste mieux que dans d’autres types d’espaces. La cité reste un creuset de nouvelles formes de sacralités. Le sacré comme fonction urbaine continue à marquer profondément les identités de la métropole globalisée, suivant des modalités qui entrent à la fois en continuité et en rupture avec les héritages des siècles passés. La restauration de Notre-Dame après l’incendie du 15 avril 2019 a rappelé la radicale centralité du sacré dans la capitale. Le chantier scruté par les yeux du monde entier a montré que cette sacralité est bien vivante, qu’elle dépasse le champ du religieux sans jamais l’exclure, qu’elle dit quelque chose de ce qu’est la ville. Au point, peut-être, de faire oublier que des dizaines de chantiers d’édifices sacrés, religieux ou mémoriels, de restauration ou de construction, sont ouverts, surtout dans les périphéries de la métropole qui affichent, par leur dynamisme en la matière, une forme de revanche, ou de rééquilibrage, face à la densité patrimoniale du sacré dans le centre urbain. Le sacré, religieux et non religieux, suscite une parure d’édifices, façonne les quartiers et les parcours de l’Antiquité à nos jours. Il suscite des rites collectifs au sein de la ville, conditionnant le lien entre les personnes et donnant du sens aux actions individuelles et collectives.