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La période particulièrement éprouvante de confinement généralisé que nous avons traversée – environ 3.4 milliards de personnes concernées soit près de la moitié de la population mondiale – a montré combien l’absence de rapport à l’autre, à l’extérieur, à la nature étaient particulièrement difficiles à vivre pour nous humains. Ce grand enfermement a été encore plus difficile à surmonter dans les grandes villes, dans les hyper-centres, où les questions de mal-logement et de surdensité se sont rappelées à nous plus que jamais. Cette expérience nous a démontré que le besoin d’espace, de nature, de lumière, sont des éléments essentiels à notre survie. Nos villes sont devenues malheureusement les symboles triomphants d’un rapport de suprématie de l’homme sur la nature et sur les non-humains (animaux, insectes, végétation,…) pour reprendre les mots de Bruno Latour.
Depuis de nombreuses années, l’économie de marché n’a eu de cesse d’exploiter chaque mètre carré disponible, et de le rentabiliser, en exerçant un contrôle continu sur les moindres espaces libres. Pourtant, beaucoup d’initiatives sont aujourd’hui en plein essor dans les métropoles du monde entier et permettent d’imaginer de multiples possibilités de réinventer la présence du paysage au cœur de l’urbain. Considérés comme de nouvelles richesses, les friches, les espaces interstitiels, les franges végétales, les espaces en marge ou délaissés, qui grèvent une partie de la surface foncière font naître des initiatives citoyennes qui tentent de maintenir ces espaces de liberté pour y réimplanter des lieux propices au développement de la nature en ville. Le paysage ayant cette force qui permet d’imposer sa présence, avec une certaine douceur, et de créer des lieux de vie et des espaces de respiration.
Il est ainsi plus que jamais nécessaire de réinterroger ce rapport au monde de nos sociétés industrialisées et connectées, en invitant la nature en ville, tout en gardant en mémoire que l’urbain est une construction humaine qui est également essentielle à la vie en société. La ville doit aujourd’hui s’enrichir de tout ce qu’elle a délaissé, tenté de maîtriser ou dominé, et être augmentée de pièces de nature, de nouveaux habitants non-humains, pour passer de l’hyper-centre urbain destructeur et moteur de l’anthropocène, à l’hyper-balade mêlant ville dense et nature en ville. L’expérience urbaine se transformant en une balade augmentée entre bâti et paysage.
Mais pourquoi s’arrêter là ? Nous devons aller encore plus loin et imaginer de véritables fragments de nature au cœur même de la ville et de nos bâtiments : prairies, forêts, collines… La frontière culturelle longuement construite avec les autres composants du vivant pourrait ainsi s’effacer pour laisser place à des cités pleinement inscrites dans le monde nouveau du 21ème siècle, celui du défi climatique et de la réponse de l’humanité aux enjeux environnementaux de demain.
https://youtu.be/mmANvp4TgD8
Antoine Ceunebroucke et Geoffrey Desplaces, Juin 2020