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Nous le savions déjà, la planète va mal, les écosystèmes sont dérèglés, la vie et sa biodiversité reculent. Pourtant nous ne faisons rien et nous nous satisfaisons de petites solutions à court terme et nous nous confortons dans une attitude individualiste et égoïste. En tant qu’être vivant nous ne sommes pas seuls, nous sommes un parmi des milliers. Pourtant, nos actions occupent et saturent tout l’espace dans lequel nous vivons. Notre évolution, nos progrès technologiques, nos solutions pour améliorer notre cadre de vie précipitent la rupture de l’équilibre fragile de la vie sur la terre. N’apprenant pas des leçons du passé, il a fallu que « notre rythme de vie » soit compromis pour que nous levions la tête et que nous mesurions la place que nous occupons dans l’univers du vivant : infime et pourtant si destructrice.
Le vivant, vraie source d’inspiration : toute une constellation d’écosystèmes en osmose, êtres (biocénose) et entités (biotopes) en interrelation (échanges, dépendance, cohabitations…). Prenons par exemple l’un des milieux à l’écosystème le plus riche au monde, doté d’une biodiversité maximale : les canopées des forêts tropicales, où la faune et la flore (insectes, oiseaux, grenouilles, primates, humains, parasites, arbres, plantes, fleurs…) coexistent en coévolution, où les forces vivantes de chaque être trouvent un équilibre dynamique (au fil du temps) et solidaire de l’ensemble. C’est justement cette osmose fondée sur les échanges entre êtres et entités qui créent la biodiversité, la culture, l’entraide, la vie.
Pensons donc, nos actions, nos forces, nos actes au sein de cette constellation du vivant, c’est urgent et indispensable. Ne nous considérons plus au centre mais faisant partie des écosystèmes. Comprenons et respectons les êtres qui cohabitent avec nous, prenons conscience des lieux et des cycles, de la richesse et de la temporalité de la vie. De cette manière, accordons-nous le temps de mesurer et de reconsidérer le rôle de l’activité humaine au sein de cet équilibre.
En quelques jours de confinement, le monde du vivant a pu reprendre ses marques, les oiseaux réapparaissent, les écosystèmes se régénèrent, notre cadre de vie s’améliore.
C’est le temps de la régénération des autres êtres vivants, retrouvons notre humanité.
Less is +nature
Retrouver un point d’équilibre dans nos écosystèmes
Ralentissons notre action humaine au quotidien. Construire moins et rénover plus, c’est redonner la priorité aux constructions existantes, à la réutilisation des moyens et des ressources, et à notre capacité de concevoir avec cet existant.
Valoriser la réversibilité de notre patrimoine
Aujourd’hui nous ne pouvons plus nous permettre de gaspiller l’espace et de spéculer avec lui. Nous devons penser au réel impact qu’impliquent la construction et la transformation des matières pour réaliser un édifice. Nous devons appuyer une politique de la ville visant plutôt la valorisation et la résilience des bâtiments et des matériaux existants (écosystèmes construits) comme un patrimoine « matériel » contre le gaspillage de ressources.
Rééduquer simplement et avec du sens
Construire moins permet aussi de redonner une place privilégiée à la réflexion dans la réalisation des projets et d’accorder l’accès à une conception moins élitiste et plus accessible aux acteurs mais aussi aux usagers. Cette démarche doit aussi nous amener vers une maitrise et une accessibilité accrue de la traçabilité des matériaux et leur transformation à travers les filières. Pour bien construire nous devons comprendre les écosystèmes de fabrication de nos matières premières (logiques intangibles) et leur réel impact sur les êtres vivants.
L’innovation ne relève parfois pas de l’invention et des prouesses techniques, mais d’une somme de connaissances et de savoir-faire que l’on retrouve dans les constructions vernaculaires. Prenons l’exemple des Malocas : ces maisons traditionnelles en forêt tropicale construites avec des matériaux locaux trouvés sur place. Elles sont constituées uniquement de matériaux d’origine végétale et ne sont pas démolies à la fin de leur vie, mais réabsorbées par le cycle naturel de régénération de la forêt.
Ralentir pour mieux guérir - slow motion (ré)génération
Par notre intervention humaine nous avons constamment proposé, redéfini et contrôlé des concepts d’aménagement de nos espaces, impliquant démolitions, constructions, réaménagements…
Et si nous laissions plus de place au hasard, au repos, afin de laisser du temps aux espaces, aux êtres vivants, à la matière de se reconstruire et de se redéfinir?
Comme en agriculture, pourquoi ne pas amener nos espaces vers une jachère urbaine afin de laisser plus de place au temps pour protéger le développement de la végétation.
Comprendre les milieux naturels
Finalement il nous semble indispensable de prendre le temps d’observer et de comprendre nos écosystèmes naturels. Cela passe par une action mesurée de nos aménagements nous menant à prendre conscience qu’agir individuellement sur une entité vivante (arbre, plante, personne, animal…) c’est agir sur l’ensemble des relations que celle-ci entretient avec une multitude d’autres organismes. Par exemple plus un arbre est ancien, plus le réseau de forces vivantes tissé autour de lui sera affecté par sa disparition. Nous devons donc comprendre les milieux naturels, leurs interactions, leur dépendances et aménager nos espaces dans la dynamique de ces constellations.
Nous devons mesurer l’importance de ces écosystèmes (naturels, construits et intangibles) afin de ramener les différentes forces vers un point d’équilibre et de retrouver la vie, le rêve, le hasard, le bonheur, le bon sens, la culture, la solidarité...
Demain Architecture Paysage / Tropiques, Mai 2020