Rien n’est encore fini et il est très excitant de se projeter dans l’après, dans ce monde nouveau auquel chacun aspire à sa manière. Mais peut-on décemment parler de demain alors même que ceux l’on applaudit tous les soirs à 20h sont malheureusement encore confrontés à un présent bien moins prospectif…. ?
ET surtout : demain, c’est à partir de quand ? Combien de temps allons-nous tous être confrontés à cette même réalité ? Peut-on dire aujourd’hui s’il faut envisager un après plutôt qu’un avec ?
Dans le film « un jour sans fin », Bill Muray recommence chaque jour la même journée ; chaque jour, le réveil sonne, il se lève, dit bonjour aux mêmes personnes, et
Chaque nouvelle journée, tout le monde semble avoir oublié la veille, sauf lui.
Ce personnage au départ détestable, méprisant, méprisable, orgueilleux ne sortira de cette boucle temporelle qu’en acceptant de changer quelque chose…
Plus que jamais, la pensée de Paul Virilio semble d’actualité. Ce que nous vivons ressemble à s’y méprendre à cet accident du temps qu’il avait si bien décrit, un accident lié à la globalisation, à la synchronisation planétaire des flux, des mœurs, des modes de vie... En fondant cette « université du désastre » le Pavillon de l’Arsenal nous permet de réfléchir à des solutions pour répondre à la catastrophe et sortir de cette boucle temporelle.
Comment ?
La première proposition, qui a été mise en oeuvre en Chine, fut là encore une réponse liée au temps : qui n’a pas été frappé par la vitesse avec laquelle cet hôpital sorti de nulle part a été construit ? En 9 jours, la Chine a réussi à mettre à disposition des équipes médicales un hôpital de 1000 lits… ! Certes, il y a probablement un peu de prudence à avoir avec les chiffres chinois, mais quand bien même ; que se passait-il en France pendant ce délai de 9 jours ? Le parallèle est particulièrement sévère !
Cette sorte de Blitz-Arkitectur, apportant une réponse en temps réel à une catastrophe, pourrait nous inspirer, si ce n’est pour le monde d’après, du moins pour le monde d’avec si tant est qu’il y a une différence entre les 2.
Cette architecture, qualifiée de légère par le lobby de l’architecture solide n’est pourtant pas toujours prise au sérieux par les gens sérieux. Trop souvent on la regarde avec compassion, tel le Chêne qui parle au roseau. On connait pourtant tous cette fable et la manière avec laquelle elle se termine.
Alors pourrait s’ouvrir une nouvelle ère pour des architectures plus frêles en apparence mais bien plus résilientes en substance, car moins consommatrices de matières et surtout, bien plus adaptables. Grâce à leur capacité à se transformer, à muter, ces architectures construites de façon responsables à partir de matériaux renouvelables, permettrait d’éviter l’effondrement généralisé en cas d’évènements non prévus au programme du concours. En intégrant (vraiment) cette dimension du temps et en la confrontant à la nécessité de répondre à des problématiques que l’on ne sait à priori prédire, on ferait alors naitre une architecture mutante, capable de se transformer pour s’adapter aux changements : climatiques, économiques, sociaux ou plus simplement de modes de vie.
Pour accompagner ce processus, il faudrait passer au crash tests les conceptions actuelles, notamment pour certains bâtiments stratégiques, publics ou hospitaliers. Ces bâtiments seraient soumis à une sorte de PPRC, l’équivalent Catastrophe du PPRI, afin d’anticiper la catastrophe, la nécessité de les transformer, comme étant l’un des éléments du programme de base auquel le bâtiment sera confronté au moins une fois dans sa vie…
Car, au-delà de la crise, qui sait comment les modes de vie vont évoluer ? Si le télétravail devient la norme et le déplacement l’exception, il faudra alors revoir tous les plans des logements standardisés construits depuis des années ; le pourrons-nous ? Pas toujours et cela passera alors bien trop souvent par la démolition comme étant la seule réponse possible face à cette incapacité à s’adapter.
Pourquoi donc la décision de tout arrêter a-t-elle été prise cette fois-ci ? Pourquoi est-ce que la question de la pollution et du changement climatique qu’elle entraine n’engendre pas ce type de décision ? Pourquoi continue-t-on à extraire, consommer bruler du carbone alors que l’on sait clairement les conséquences que cela a sur notre environnement !?
Pour qui ?
Au-delà de la situation sanitaire, se cachent d’autres souffrances. « Des personnes que l’on ne voyait jamais sont venues chercher des repas » témoignent des associations qui font un travail exceptionnel pour compenser la mise en coma artificiel de l’économie qui assurait, bon an mal an, l’alimentation et la dignité du plus grand nombre…
Ce qui est sûr c’est que l’expérience unique n’aura pas été du tout vécue de la même manière pour tous : exilés de l’Ile de Ré ou entassées dans de petits logements insalubres, coincés dans des rues vidées ou hospitalisés, obligés de travailler ou contraints de ne plus le faire, il est certain que nous n’aurons pas tous la même manière de sortir de cette situation…
Quoi qu’il en soit, jamais la question de l’abri, du logement n’aura été aussi importante : pas d’abri, pas de confinement ! Espérons que cette remise à plat des valeurs permettra de ré-organiser la ville sur de nouvelles bases, plus saines, donnant la priorité au logement, à la proximité, aux besoins essentiels.
Alors demain ?
Le nouveau modèle de développement, plus vertueux d’un point de vue environnemental, est-il prêt à encaisser la crise sociale ? Beaucoup d’exemples existent et il est certainement plus que nécessaire de lire et relire Cyril Dion, Pierre Rabhi et tous ceux qui comme eux montrent qu’il existe de vraies solutions nouvelles à mettre en place plus respectueuses de l’environnement.
Il faudra déployer des trésors d’imagination pour intégrer les hommes et les femmes sans désintégrer l’environnement, pour dé-densifier les villes sans consommer toutes les terres agricoles ni générer des embolies de flux de personnes et de marchandises, pour fabriquer des bâtiments plus agiles, plus évolutifs et plus adaptables sans pour autant renoncer à ce qu’ils soient plus durables…
ET surtout : demain, c’est à partir de quand ? Combien de temps allons-nous tous être confrontés à cette même réalité ? Peut-on dire aujourd’hui s’il faut envisager un après plutôt qu’un avec ?
CHAPITRE 1 : UN ACCIDENT DU TEMPS
Et si demain n’existait pas ?Dans le film « un jour sans fin », Bill Muray recommence chaque jour la même journée ; chaque jour, le réveil sonne, il se lève, dit bonjour aux mêmes personnes, et
Chaque nouvelle journée, tout le monde semble avoir oublié la veille, sauf lui.
Ce personnage au départ détestable, méprisant, méprisable, orgueilleux ne sortira de cette boucle temporelle qu’en acceptant de changer quelque chose…
Plus que jamais, la pensée de Paul Virilio semble d’actualité. Ce que nous vivons ressemble à s’y méprendre à cet accident du temps qu’il avait si bien décrit, un accident lié à la globalisation, à la synchronisation planétaire des flux, des mœurs, des modes de vie... En fondant cette « université du désastre » le Pavillon de l’Arsenal nous permet de réfléchir à des solutions pour répondre à la catastrophe et sortir de cette boucle temporelle.
Comment ?
La première proposition, qui a été mise en oeuvre en Chine, fut là encore une réponse liée au temps : qui n’a pas été frappé par la vitesse avec laquelle cet hôpital sorti de nulle part a été construit ? En 9 jours, la Chine a réussi à mettre à disposition des équipes médicales un hôpital de 1000 lits… ! Certes, il y a probablement un peu de prudence à avoir avec les chiffres chinois, mais quand bien même ; que se passait-il en France pendant ce délai de 9 jours ? Le parallèle est particulièrement sévère !
Cette sorte de Blitz-Arkitectur, apportant une réponse en temps réel à une catastrophe, pourrait nous inspirer, si ce n’est pour le monde d’après, du moins pour le monde d’avec si tant est qu’il y a une différence entre les 2.
CHAPITRE 2 : LE CHÊNE ET LE ROSEAU
Est-ce-que la catastrophe actuelle nous permettra de changer de regard et de mode de pensée… ? Est-ce que l’on continuera à concevoir des bâtiments toujours plus lourds, toujours plus consommateurs de matières, quelle qu’elle soit… ? Est-ce que l’on continuera à toujours construire de la même manière, en réinventant à chaque chantier le process pour finalement construire la même chose, en obligeant les premiers de corvées, dont font indéniablement partie les ouvriers du bâtiment en temps « normal », à travailler dans des conditions dont plus personne ne veut… ?Cette architecture, qualifiée de légère par le lobby de l’architecture solide n’est pourtant pas toujours prise au sérieux par les gens sérieux. Trop souvent on la regarde avec compassion, tel le Chêne qui parle au roseau. On connait pourtant tous cette fable et la manière avec laquelle elle se termine.
Alors pourrait s’ouvrir une nouvelle ère pour des architectures plus frêles en apparence mais bien plus résilientes en substance, car moins consommatrices de matières et surtout, bien plus adaptables. Grâce à leur capacité à se transformer, à muter, ces architectures construites de façon responsables à partir de matériaux renouvelables, permettrait d’éviter l’effondrement généralisé en cas d’évènements non prévus au programme du concours. En intégrant (vraiment) cette dimension du temps et en la confrontant à la nécessité de répondre à des problématiques que l’on ne sait à priori prédire, on ferait alors naitre une architecture mutante, capable de se transformer pour s’adapter aux changements : climatiques, économiques, sociaux ou plus simplement de modes de vie.
Pour accompagner ce processus, il faudrait passer au crash tests les conceptions actuelles, notamment pour certains bâtiments stratégiques, publics ou hospitaliers. Ces bâtiments seraient soumis à une sorte de PPRC, l’équivalent Catastrophe du PPRI, afin d’anticiper la catastrophe, la nécessité de les transformer, comme étant l’un des éléments du programme de base auquel le bâtiment sera confronté au moins une fois dans sa vie…
Car, au-delà de la crise, qui sait comment les modes de vie vont évoluer ? Si le télétravail devient la norme et le déplacement l’exception, il faudra alors revoir tous les plans des logements standardisés construits depuis des années ; le pourrons-nous ? Pas toujours et cela passera alors bien trop souvent par la démolition comme étant la seule réponse possible face à cette incapacité à s’adapter.
CHAPITRE 3 : UNE QUESTION DE PRIORITÉ
Alors que nous pouvions encore gambader joyeusement dans les rues de Paris et de partout ailleurs en France, le 14 Mars, le Nouvel Obs publiait un article titré ainsi : « En Chine, la baisse de la pollution va épargner plus de vies humaines que le virus en aura coûté ».En effet détaille l’article, la pollution tue chaque année 1,1 millions de personnes en Chine ; de ce fait, il est probable que l’impact du COVID sera en réalité positif sur le plan sanitaire du fait de la mise à l’arrêt de l’activité… et ce, malgré la polémique sur les chiffres chinois !Pourquoi donc la décision de tout arrêter a-t-elle été prise cette fois-ci ? Pourquoi est-ce que la question de la pollution et du changement climatique qu’elle entraine n’engendre pas ce type de décision ? Pourquoi continue-t-on à extraire, consommer bruler du carbone alors que l’on sait clairement les conséquences que cela a sur notre environnement !?
Pour qui ?
Au-delà de la situation sanitaire, se cachent d’autres souffrances. « Des personnes que l’on ne voyait jamais sont venues chercher des repas » témoignent des associations qui font un travail exceptionnel pour compenser la mise en coma artificiel de l’économie qui assurait, bon an mal an, l’alimentation et la dignité du plus grand nombre…
Ce qui est sûr c’est que l’expérience unique n’aura pas été du tout vécue de la même manière pour tous : exilés de l’Ile de Ré ou entassées dans de petits logements insalubres, coincés dans des rues vidées ou hospitalisés, obligés de travailler ou contraints de ne plus le faire, il est certain que nous n’aurons pas tous la même manière de sortir de cette situation…
Quoi qu’il en soit, jamais la question de l’abri, du logement n’aura été aussi importante : pas d’abri, pas de confinement ! Espérons que cette remise à plat des valeurs permettra de ré-organiser la ville sur de nouvelles bases, plus saines, donnant la priorité au logement, à la proximité, aux besoins essentiels.
Alors demain ?
Le nouveau modèle de développement, plus vertueux d’un point de vue environnemental, est-il prêt à encaisser la crise sociale ? Beaucoup d’exemples existent et il est certainement plus que nécessaire de lire et relire Cyril Dion, Pierre Rabhi et tous ceux qui comme eux montrent qu’il existe de vraies solutions nouvelles à mettre en place plus respectueuses de l’environnement.
Il faudra déployer des trésors d’imagination pour intégrer les hommes et les femmes sans désintégrer l’environnement, pour dé-densifier les villes sans consommer toutes les terres agricoles ni générer des embolies de flux de personnes et de marchandises, pour fabriquer des bâtiments plus agiles, plus évolutifs et plus adaptables sans pour autant renoncer à ce qu’ils soient plus durables…
Guillaume Hannoun, Mai 2020