Le Pavillon de l'Arsenal invite tous les publics à venir découvrir et comprendre les fondements de l'architecture au travers de cours de cette université populaire animée par Richard Scoffier, architecte, philosophe, professeur des Écoles Nationales Supérieures d’architecture.
Cette édition 2018 de l’Université populaire du Pavillon de l’Arsenal propose de regarder différemment les grands équipements qui scandent la vie collective. Au-delà des fonctions spécifiques pour lesquelles ils ont été conçus, nous les étudierons comme des dispositifs permettant la transformation des foules d’individus dispersées en communauté.
Nous aborderons d’abord les grands réceptacles - arènes et stades - ainsi que les lieux de passages - gares et aéroports - où les foules se pressent et se croisent en flux continus.
Puis les tribunaux où l’on sépare ceux qui sont exclus de ceux qui restent intégrés. Enfin les cimetières, ces enclos silencieux disséminés à la périphérie des villes, où sont conservées religieusement les reliques des citoyens disparus et qui composent l’envers terminal des théâtres d’agitation permanente. Donner aux foules rassemblées un sentiment d’appartenance à une humanité transcendante ; organiser des espaces de frictions, d’informations, de rencontres et d’échanges ; exclure une certaine partie de la population pour mieux en faire prospérer une autre. Accorder à chaque membre de la société, même le plus infime, son droit à l’immortalité. Tel est le programme de survie de la communauté laïque - constamment actualisé par les stades, les gares, les tribunaux et les cimetières - que nous analyserons durant ce cycle de cours.
ARÈNES
Au-delà des grandes manifestations sportives ou musicales qui s’y déroulent, les stades peuvent être considérés comme de puissants générateurs de sentiment communautaire. Deux types distincts d’édifices répondent à ces lieux de rassemblements où s’expriment parfois violemment de profonds antagonismes. Les premiers, dionysiaques, jouent délibérément avec l’énergie générée par l’enthousiasme et l’affrontement des spectateurs. Ils se proposent comme des constructions de forme elliptique. Ainsi les stades dessinés par Herzog et de Meuron se présentent-ils comme des instruments de musique aidant la transformation des cris et des hurlements en une clameur unitaire, afin de permettre à la foule de s’appréhender comme une communauté fusionnelle. Les seconds, apolliniens, tendent au contraire à assimiler l’arène à un théâtre, à un espace ouvert et intégré à la ville. Refusant l’ellipse, les constructions conçues par Gregotti, Nouvel et autres Souto de Moura, déclinent les possibilités du rectangle et brisent volontairement l’unicité organique des formes circulaires pour permettre au public d’assister aux manifestations sportives sans entonner fatalement le cri primal par lequel la communauté renaît à elle-même.