Comme les années précédentes, nous allons revenir sur des actes triviaux qui nous paraissent naturels mais qui ne le sont pas, parce qu’ils sont produits par des dispositifs architecturaux qui, telles les mains d’un sculpteur, les modèlent et leur donnent forme. Jardiner, soigner, punir, jouir...
Interrogeons Georges Bataille. Les architectes ne dessinent-ils pas que des prisons, des maisons de redressement et des mécanismes de surveillance ? Des espaces qui, comme nous l’avons abordé les années précédentes, nous éloignent par la contrainte et par la force de notre bestialité originelle. Des prothèses qui nous poussent à nous laver, à manger et à dormir à heure fixes, mais aussi à lire et à écrire - à préférer le signe à la chose - à chanter au lieu de hurler... Parcourons ces mécanismes conçus pour nous élever, comme le célèbre Panopticon de Jeremy Bentham : un dispositif de contrôle destiné à être intériorisé par les détenus pour leur permettre d’acquérir la conscience dont ils étaient supposés démunis... Ou l’enclave enfermant les «Prisonniers volontaires de l’architecture», la prison prothétique dessinée par Rem Koolhaas pour son diplôme qu’il ne cessera par la suite de reproduire dans ses projets. Questionnons l’esthétique du sublime qui trouve son origine non dans le plaisir - comme celle du beau - mais dans la souffrance et l’angoisse. Passons par Jean Nouvel et ses dispositifs spatiaux qui déterritorialisent et déracinent leurs occupants pour leur faire accomplir la révolution Galiléenne, en leur faisant comprendre que la Terre tourne autour du Soleil et non l’inverse. Terminons au Qatar par un projet non réalisé de l’agence OMA visant, dans un sadisme total, à humaniser des chevaux de courses en les plaçant face à la tragédie de l’existence.